REFH proteste contre le décret à propos des victimes de violences conjugales qui vide de sens la loi qu’il est censé concrétiser en exigeant de la victime de mandater un huissier pour qu’il prévienne le conjoint dans les 24 h (intenable pour les femmes) sous peine d’abandon des poursuites ! 

Le décret complète les dispositions d’une loi adoptée peu après la clôture du Grenelle contre les violences conjugales. Elle porte notamment sur les ordonnances de protection, un outil à l’efficacité saluée mais encore insuffisamment utilisé.

Délivré par les juges aux affaires familiales, il permet de mettre à l’abri les femmes victimes de violences et de statuer sur les mesures relatives aux enfants et au logement, sans qu’un dépôt de plainte soit nécessaire.

Porté par le député du Lot Aurélien Pradié (Les Républicains), le texte voté en décembre 2019 prévoyait de réduire les délais d’attribution des ordonnances de protection à six jours à compter de la date de fixation de l’audience, contre une quarantaine jusque-là. Une tentative de mieux répondre à l’urgence de certaines situations saluée à l’époque, bien qu’elle ne comporte pas d’aspect contraignant.

Or, le décret paru le 27 mai « sur le rapport de la garde des sceaux, ministre de la justice » introduit un autre délai dans le dispositif, assorti, lui, de conséquences considérables. Il prévoit, en effet, que la victime informe, à ses frais, par voie d’huissier, son conjoint ou ex de la procédure ouverte à son encontre, dans un délai de vingt-quatre heures, « à peine de caducité de la requête », son annulation donc. « Un recul stupéfiant » des avancées législatives en matière de protection des victimes dont s’indignent plusieurs associations de défense des victimes.
Dans un communiqué commun envoyé lundi, plusieurs d’entre elles, dont la Fondation des femmes et la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), demandent « en urgence la suppression de ce nouveau délai qui met les femmes en danger et rend les procédures impossibles à tenir ».
 
Article de Solène Cordier dans Le Monde du 9 juin 2020